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Poème du jour : "La Voix", par Henri de Régnier

Photo du rédacteur: Irène de PalacioIrène de Palacio

Dernière mise à jour : 3 janv.


"Ma tristesse me vient de plus loin que moi-même, Elle m’est étrangère et ne m’appartient pas"




La Voix

La Sandale ailée, 1906


Je ne veux de personne auprès de ma tristesse

Ni même ton cher pas et ton visage aimé,

Ni ta main indolente et qui d’un doigt caresse

Le ruban paresseux et le livre fermé.


Laissez-moi. Que ma porte aujourd’hui reste close ;

N’ouvrez pas ma fenêtre au vent frais du matin ;

Mon cœur est aujourd’hui misérable et morose

Et tout me paraît sombre et tout me semble vain.


Ma tristesse me vient de plus loin que moi-même,

Elle m’est étrangère et ne m’appartient pas,

Et tout homme, qu’il chante ou qu’il rie ou qu’il aime,

À son heure l’entend qui lui parle tout bas,


Et quelque chose alors se remue et s’éveille,

S’agite, se répand et se lamente en lui,

À cette sourde voix qui lui dit à l’oreille,

Que la fleur de la vie est cendre dans son fruit.

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