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Poèmes du jour : "A Dame Mélancolie" et "La solitude", par Émile Boissier


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Émile Boissier

Dame Mélancolie



A Dame Mélancolie

Émile Boissier, Dame Mélancolie (1893)


"Dame Mélancolie", en robe de brocart

Se promenait au bord de l'antique terrasse,

En quête de songeurs, dont l'âme par trop lasse

Fuit le rire brutal et s'exile à l'écart.


Le parterre odorant des jasmins et des roses

Evoquait les splendeurs royales d'autrefois ;

Et la morne tristesse éparse dans les bois

Faisait subir au coeur mille métamorphoses.


— "Chère Dame, je suis un enfant très rêveur,

Epris de vos grands yeux où brille la Folie.

Pardonnez mon amour, "Dame Mélancolie,"

Votre regard est doux et triste ; — il me fait peur."


Son baiser, lentement a recherché ma bouche ;

Puis faisant, d'un air noble, un geste, elle m'a dit :

— "Sois mon amant ; tout autre amour est interdit."

J'ai pour elle depuis une amitié farouche.



La solitude

Émile Boissier, Dame Mélancolie (1893)


J'ai rêvé d'être seul en un parc centenaire,

Où l'esprit se noierait au lac du Souvenir ;

Mélancolique ainsi qu'un jeune poitrinaire,

Je ne pourrais percer les brumes d'avenir.


Mes regards se perdraient à l'horizon, très vagues,

— Regards d'enfant naïf, symboliques et doux —

Et je devinerais, là-bas, le bruit des vagues

Déferlant sur les rocs en de houleux remous.


La Mer serait tout près et pourtant invisible.

La Mer ! Oh ! je voudrais mourir à sa chanson

— Berceuse de nourrice, ironique, insensible ;

Complainte répétant toujours le même son. —


Je m'étendrais sur un linceul de roses blanches,

Ayant dessus mon front les senteurs des lilas,

Et sous les fleurs de Mort, pleuvant en avalanches,

Je m'anéantirais, éternellement las.

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